La fragilisation de la nanostructure du plastique dans l’océan

Fragilisation Plastique Océan

L’étude de la dégradation du polyéthylène en milieu marin à l’échelle moléculaire

Bienvenue dans le monde infiniment petit de la nanostructure d’un déchet d’emballage voguant dans la mer !

La plupart des études sur la fragilisation du plastique dans l’océan se concentrent sur les changements chimiques. En effet, sous l’influence de divers facteurs comme la lumière ou l’atmosphère, la nature détruit lentement les déchets. Année après année, un macroplastique (grande taille) se transforme en un amas de microplastiques (petite taille).

Des études plus récentes ont permis d’examiner la dégradation physique de la structure moléculaire de ces déchets en milieu marin. C’est dans le cadre de ces recherches que l’équipe de l’expédition du 7e continent a collecté soigneusement plusieurs débris d’emballages dans l’océan Atlantique.

Comment se structure la matière plastique à l’échelle moléculaire ? Par quels moyens les scientifiques analysent-ils leurs échantillons ? Qu’est-ce que les chercheurs ont découvert à travers leurs résultats ?

Sans plus attendre, découvrez l’étude de la décomposition lente du polyéthylène dans l’eau de mer.

Avant la fragilisation du plastique dans l’océan : la structure moléculaire du polyéthylène à l’état initial

Depuis les années 50, les industriels utilisent massivement des emballages composés principalement de polyéthylène. Ce composant est issu de la polymérisation de l’éthylène, un hydrocarbure insaturé (pétrole). Son utilisation répond majoritairement aux besoins de stocker, protéger et transporter des denrées alimentaires. Peu coûteux, il se retrouve dans la plupart des déchets flottant dans les mers.

Le polymère thermoplastique

En observant un microplastique à l’échelle moléculaire, on remarque qu’il est formé par plusieurs unités chimiques appelées monomères. L’ensemble de ces unités est dénommé polymère. Ce dernier peut être composé :

  • de chaînes linéaires (à l’image de plusieurs fils entrelacés) ;
  • ou de chaînes ramifiées (à l’image d’un arbre avec toutes ses branches).

Le terme « thermoplastique » signifie que le matériau peut être dissous dans certains solvants et se ramollir à la chaleur.

Les polymères thermoplastiques sont soit semi-cristallins, soit amorphes. La plupart des déchets plastiques présents en mer étant des polymères semi-cristallins. À l’échelle moléculaire, ces derniers se matérialisent en plusieurs couches superposées les unes aux autres.

On en décèle deux principales :

  • des zones cristallines (formées par de petites sphères) ;
  • des zones amorphes (sans forme).

L’agencement lamellaire du polyéthylène

Bien que composé de zones cristallines et/ou amorphes, de chaînes linéaires ou ramifiées, le plastique se structure globalement sous forme lamellaire.

Grâce au schéma ci-dessous, vous pouvez observer un modèle lamellaire semi-cristallin. En bleu, les zones cristallines et, en blanc, les zones amorphes. Puis en vert, les chaînes linéaires qui couvrent à la fois des régions cristallines et amorphes. Vous découvrez maintenant les bandes horizontales séparées par des interfaces : c’est l’agencement lamellaire du polyéthylène. En effet, on voit très nettement se dessiner une structure organisée en lamelles alternées de zones cristallines et de zones amorphes.

structure lamellaire polyéthylène
Structure lamellaire du polyéthylène

Le taux de cristallinité

Ce taux nous indique la proportion de matière à l’état cristallin composant le morceau de plastique. L’état cristallin caractérisant un solide dont les atomes se rangent selon une distribution répétitive.

Cette donnée est importante, car les propriétés de cette matière ne seront pas les mêmes en fonction de sa cristallinité. En effet, plus le fragment de plastique est cristallin, plus il est friable. Par conséquent, sa fragilisation en sera affectée ainsi que sa durée de vie dans l’eau.

La décomposition du polymère dans l’eau de mer : les techniques d’analyse

Actuellement, les scientifiques utilisent plusieurs techniques expérimentales afin d’étudier la fragilisation du plastique en milieu marin prolongé. Ils recueillent dans les océans plusieurs déchets allant du macroplastique au microplastique. Plus difficiles à obtenir, les micro-déchets sont récupérés à l’aide d’un filet. L’analyse sous différentes méthodes de ces prélèvements apporte des éléments de réponse quant aux mécanismes physiques de leur désagrégation.

La diffusion des rayons X

Cette technique d’analyse consiste à diffuser des ondes de rayon X à travers une matière (liquide, solide, etc.). Elle est utilisée notamment dans l’étude de la nanostructure des emballages plastiques afin d’examiner les chaînes du polyéthylène. Cette méthode a l’avantage de ne pas détruire le produit étudié.

La spectroscopie Raman

Également non-destructrice, cette pratique consiste à envoyer un faisceau de lumière sur un prélèvement et d’observer comment elle se diffuse. La fréquence de la lumière change en fonction du milieu dans lequel évolue le produit, dans notre cas, l’eau. Cette technique permet aux scientifiques de collecter des données sur la longueur des chaînes du polyéthylène.

La calorimétrie différentielle à balayage

Cette méthode d’analyse thermique consiste à mesurer les différences de chaleur entre un échantillon et une valeur de référence. La valeur de référence étant celle du matériau à l’état initial. Les chercheurs peuvent ainsi mesurer le taux de cristallinité d’un microplastique et observer son processus de vieillissement.

La chromatographie d’exclusion de taille

Cette approche permet de séparer des composants d’un fragment d’emballage sur la base de leur taille moléculaire. Elle apporte une meilleure vision sur les propriétés de masse et de surface du plastique évoluant dans un environnement océanique.

La désagrégation d’un emballage plastique en milieu marin : les résultats de l’étude

Grâce aux prélèvements effectués entre mai 2014 et juin 2015 par l’équipe du 7e continent, les scientifiques de sept laboratoires différents ont découvert quatre conclusions :

  1. Le polyéthylène devient plus cristallin dans l’eau de mer.
  2. L’exposition à la lumière UV va provoquer une croissance des lamelles cristallines. Cette transformation physique va directement influencer la perméabilité et la stabilité mécanique du produit. Autrement dit, le plastique va être fortement fragilisé.
  3. La tendance claire d’une perturbation de l’ordre lamellaire d’un emballage dans l’océan. On appelle cela le processus naturel de vieillissement.
  4. L’existence d’un lien entre les changements chimiques et les mécanismes physiques de destruction d’un emballage. En effet, l’agencement des lamelles représente une barrière pour la diffusion des gaz (oxygène) dans le polymère. La perte de la structure lamellaire permet donc une dégradation plus libre dans le temps (années) grâce à l’oxydation.

Incontestablement, un emballage plastique dans l’eau de mer se désagrège. Très lentement, il se cristallise et se détériore en plusieurs microplastiques. L’un des effets néfastes étant que ces nanoplastiques affectent la faune et la flore océaniques. On les retrouve ainsi incrustés dans les coraux. Pires, ils sont ingérés par les animaux marins. L’impact écologique du plastique dans les océans est sans conteste !

Filet permettant la récupération du plastique dans la mer

L’utilisation des matériaux polymères ne cesse de croître. Tout comme l’alimentaire, la matière plastique se retrouve dans des secteurs industriels tels que l’aérospatial ou l’industrie automobile. Les services de développement de grandes entreprises poursuivent chaque jour leurs recherches afin d’obtenir un matériau toujours plus performant. Pour ce faire, ils incorporent des fibres de verre ou du carbone, le rendant ainsi plus résistant. Entre le monde industriel et celui de la protection des océans, les intérêts divergents. Les scientifiques doivent continuellement faire de nouvelles analyses afin d’avoir des données à jour. L’étude de la fragilisation du plastique dans l’océan poursuit ainsi sa route écologique.

Article rédigé par Andréa Marinetti au cours de la formation en rédaction web seo chez Formation Rédaction Web. La relecture scientifique a été réalisée par Valérie Pruneta, docteur en biochimie.

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